Plan de l’intervention du Directeur général à un Comité sur la crise alimentaire 6 octobre 2008

le 6 octobre 2008

Texte préparé pour l'intervention

Je suis très heureux que nous engagions ce débat et vous remercie de m'avoir invité.

Depuis plusieurs semaines le monde est secoué par la crise des marchés financiers américains. On comprend aisément pourquoi : les événements auxquels nous assistons ont de profondes répercussions pour la stabilité de l'économie mondiale. Mais nous ne devons pas pour autant perdre de vue l'« autre crise » qui frappe l'économie mondiale.

Aujourd'hui je parlerai, non pas uniquement des aliments, mais également de l'énergie, car nombreux sont les pays qui souffrent du renchérissement de ces deux types de produits.

En juin le FMI a dressé un bilan de l'impact mondial de l'envolée des prix des produits alimentaires et énergétiques. La semaine dernière nous avons revu ce bilan et je souhaiterais en partager avec vous les résultats.

Premièrement, le problème n'a pas disparu. On constate certes une relative accalmie depuis quelques mois, mais les prix de l'énergie et des aliments restent nettement supérieurs à ce qu'ils étaient lorsque la récente flambée s'est initialement produite. La situation reste donc fort délicate pour beaucoup de pays.

Deuxièmement, comme c'est souvent le cas, le complément d'aide promis aux pays ne s'est pas matérialisé. De nombreux pays et des populations entières l'attendent toujours.

Permettez-moi de rappeler certains faits.

Tous les pays importateurs nets d'aliments et d'énergie ont souffert de la flambée des prix et une cinquantaine d'entre eux se trouvent dans une situation particulièrement pénible.

L'impact du renchérissement des aliments et de l'énergie sur les pays en développement, loin de s'être atténué, n'a fait que s'accentuer depuis notre bilan de juin dernier. Nous nous attendons donc à ce que quelque 50 pays à faible revenu et à revenu intermédiaire continuent d'être « menacés » cette année et jusqu'à la fin de 2009  entendons par-là que leurs positions de réserves seront extrêmement faibles. (Ce transparent vous montre ces 50 pays).

Pour donner la mesure des choses :

Selon nos prévisions, la facture énergétique des pays à faible revenu importateurs nets s'alourdira cette année de 3,2 % de leur PIB de 2008 par rapport à 2007, soit 60 milliards de dollars.

La facture alimentaire de 43 pays importateurs nets d'aliments augmentera de 0,8 % de leur PIB de 2008, soit 7,2 milliards de dollars.

Il s'agit là d'un choc considérable.

Les budgets nationaux sont également mis à rude épreuve, ne serait-ce que parce que beaucoup de pays ont réagi à la montée des cours en allégeant les taxes et les tarifs, en augmentant les subventions générales, en étoffant les programmes de transferts et en relevant les salaires de la fonction publique. Le gros du surcoût budgétaire s'explique par l'augmentation des subventions aux produits énergétiques ou la réduction des impôts frappant les aliments.

Dans 37 pays, le coût budgétaire combiné des mesures adoptées pour parer au renchérissement des produits énergétiques et alimentaires devrait dépasser 1 % du PIB. Outre que ces subventions ne sont pas viables à terme, elles sont presque toujours mal ciblées. (Vous voyez à l'écran la cartographie mondiale de l'augmentation des coûts budgétaires.) Par exemple, les subventions axées sur l'essence, produit principalement consommé par les classes sociales plutôt favorisées, profitent à peine aux pauvres.

L'inflation est également en hausse. Dans les pays à faible revenu le taux moyen a gagné près de 3 points de pourcentage au deuxième trimestre 2008, et il devrait dépasser 13 % d'ici la fin de l'année. (Ce transparent montre l'inflation dans le monde et la contribution des prix alimentaires et énergétiques).

Nous le savons tous, l'inflation n'épargne personne, mais elle touche particulièrement les pauvres, ceux qui sont le moins en mesure de se protéger contre la vie chère, et en particulier contre le renchérissement des aliments.

Notre but doit donc être d'aider les pays à maîtriser l'inflation tout en aidant les pauvres.

Il est important de cibler l'aide et les subventions. Les gouvernements n'ont pas la tâche facile : bien souvent les pays à faible revenu n'ont pas les capacités administratives pour le faire. Mais une démarche qui privilégie les subventions aux produits fortement consommés par les pauvres ou, dans la mesure du possible, un meilleur ciblage des dispositifs de protection sociale sont nécessaires pour protéger plus efficacement les couches de population vulnérables.

Les bailleurs de fonds doivent également jouer leur rôle. L'argent à lui seul ne viendra certes pas à bout du problème, mais à n'en pas douter il fait partie de la solution. Le concours des donateurs est vital pour atténuer le coût de l'ajustement et limiter les effets sur les revenus réels et la pauvreté, ainsi que pour contribuer à financer les programmes dans l'agriculture et dans les autres secteurs.

Il y a une difficulté qu'il ne faut pas perdre de vue : les contraintes vont se multiplier sur les budgets des pays avancés du fait de la crise financière. Il importe que ces pays ne réagissent pas à la crise en coupant l'aide, laquelle profite aux populations les plus pauvres et les plus vulnérables de la planète.

Pour conclure, quelques mots sur ce que fait le FMI. Notre aide se décline de trois manières :

Nos conseils de politique économique. Par exemple, au Honduras nous avons conseillé les autorités dans la restructuration des tarifs électriques et l'emploi des économies ainsi dégagées pour renforcer un dispositif ciblé de protection sociale et financer le fonds d'investissement social. En Bolivie nos conseils aux autorités ont porté sur la suppression de la subvention à l'essence qui profitait pour plus de 60 % aux 10 % de ménages les plus aisés, et la mise en place de subventions ciblées au GPL et aux aliments.

Notre assistance technique. Par exemple au Pérou nous avons aidé les autorités à accroître l'efficience de leurs subventions aux produits énergétiques.

Nos concours financiers. Par exemple en Haïti nous avons fourni des ressources complémentaires pour aider à amortir l'ajustement au renchérissement des produits énergétiques et alimentaires. De fait, à ce jour, nous avons augmenté nos prêts en faveur de 15 pays touchés.

(Transparent sur le financement du FMI par pays.)

Par ailleurs, nous faisons en sorte que les pays puissent recourir plus facilement à l'aide financière du FMI. Il y a une quinzaine de jours le Conseil d'administration a approuvé ma proposition de réforme de notre Facilité de protection contre les chocs exogènes. Le but est de fournir une aide plus rapide et plus étoffée, assortie d'une conditionnalité mieux ciblée et offrant plus de souplesse. Par exemple, la facilité prévoit désormais une composante d'accès rapide qui permettra aux pays membres de demander une assistance sans programme, et de se prévaloir du guichet sans avoir à annuler un Instrument de soutien à la politique économique ou à renoncer à une Aide d'urgence post-conflit.

Autrement dit, nous n'avons pas oublié les pays en développement et nous ne devons pas les oublier, quels que soient les rebondissements à venir de la crise des marchés financiers.

Merci encore de m'avoir invité à ce débat dont j'attends beaucoup.

DÉPARTEMENT DE LA COMMUNICATION DU FMI

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