"L’algèbre mondiale des politiques monétaires non conventionnelles" Christine Lagarde, Directrice générale, Fonds monétaire international

le 23 août 2013

Christine Lagarde
Directrice générale, Fonds monétaire international
Jackson Hole, 23 août 2013

Texte préparé pour l’intervention

Bonjour! Je voudrais remercier tout d’abord Esther George de m’avoir invitée au Symposium de cette année. Je suis ravie d’être ici, comme toujours. Le Système fédéral de réserve, et cette manifestation en particulier, sont bien connus pour être à la pointe des travaux de recherche et d’analyse en matière de politique monétaire. Les échanges de la matinée n’ont fait que confirmer cette réputation.

Pour les décideurs d’aujourd’hui, l’enjeu consiste à repenser et réinventer les moyens de remettre nos économies au travail. L’un des aspects les plus remarquables à cet égard est que les banques centrales des pays avancés n’ont pas hésité à se jeter à l’eau.

À de nombreux égards, les banques centrales ont été les héros de la crise financière mondiale. Comparées à la politique monétaire classique, les politiques monétaires non conventionnelles de ces dernières années ont été plus ambitieuses, à la fois par leurs objectifs et par leur envergure. Ces actions exceptionnelles ont aidé le monde à éviter le précipice d’une nouvelle Grande Dépression.

La crise nous a aussi rappelé à quel point le monde est interconnecté. En 2008, une faillite aux États-Unis a mis à genoux l’économie mondiale. Puis ce sont les difficultés de la zone euro qui l’ont ébranlée. Et aujourd’hui, ce qui nous préoccupe, c’est le risque qu’un repli de l’activité dans les pays émergents ne provoque un ralentissement généralisé de la croissance.

Les politiques monétaires non conventionnelles ajoutent une nouvelle dimension. Nous y pensons beaucoup, bien entendu, au vu des développements de la semaine. Une fois de plus, nous voyons bien que les actions menées dans un coin de la planète peuvent avoir des répercussions à l’échelle mondiale. Et il appartient précisément au FMI de suivre de près ces évolutions.

De manière plus générale, avec les politiques monétaires non conventionnelles, nous naviguons en territoire inconnu. C’est un peu comme entrer dans une pièce obscure. Pour citer John F. Kennedy, «plutôt que de maudire l’obscurité, mieux vaut allumer une chandelle pour nous guider vers un avenir sûr et serein». Il nous incombe à tous d’allumer une chandelle dans cette pièce obscure.

Mon principal message aujourd’hui est donc le suivant : nous devons mieux travailler ensemble pour mieux comprendre les effets de ces politiques non conventionnelles, au plan local comme au plan mondial, et ce qu’il faut en conclure pour les stratégies de retrait. Surtout, nous devons utiliser le temps de façon avisée et ne pas gaspiller l’espace offert par ces politiques. Il incombe aux décideurs du monde entier, qu’ils aient des responsabilités nationales ou internationales, de prendre toutes les mesures nécessaires pour rétablir la stabilité et la croissance, ainsi que pour réduire les déséquilibres.

Dans cet esprit, je voudrais partager avec vous le point de vue du FMI dans trois grands domaines :

1) Premièrement, dans quelle mesure les politiques monétaires non conventionnelles, aux États-Unis et ailleurs, ont-elles influé sur l’économie mondiale jusqu’à présent?

2) Deuxièmement, quels effets auront-elles sur le monde dans la période à venir, étant donné en particulier que nous nous préparons à nous en affranchir?

3) Enfin, troisièmement, existe-t-il un ensemble de politiques envisageable à l’échelle mondiale qui soit davantage à même d’assurer une croissance durable?

1. Les bienfaits des politiques monétaires non conventionnelles jusqu’à présent

La première question à se poser la suivante : avec le recul, les politiques monétaires non conventionnelles étaient-elles nécessaires et ont-elles été utiles? Je sais que pour certains la question reste ouverte. Pour le FMI, en revanche, il est clair que jusqu’à présent ces politiques ont eu un effet positif.

Qu’est-ce qui me permet d’affirmer cela? Au tout début de la crise, les politiques monétaires non conventionnelles ont permis d’éviter l’effondrement du système financier et de l’activité. Cela a été possible grâce à la politique d’assouplissement quantitatif aux États-Unis et aux achats d’actifs à grande échelle (LSAP) au Royaume-Uni. Par la suite, les opérations de refinancement à long terme et les opérations monétaires sur titres (OMT) de la BCE ont considérablement réduit le risque extrême d’un éclatement de la zone euro.

Pendant les turbulences financières, les politiques monétaires non conventionnelles ont contribué à soutenir à la fois l’activité économique et la stabilité financière, tant au plan national qu’international. Cela a été particulièrement vrai dans la phase initiale de ces politiques, lorsque ces objectifs étaient complémentaires.

Le FMI a attribué une place bien plus large aux conséquences de ces politiques lorsqu’il a redéfini le cadre de sa surveillance. Nous traçons les interconnexions au sein des pays, par exemple entre le secteur financier et l’économie réelle, et entre les pays.

Il est difficile d’identifier avec précision les ramifications de ces politiques. Il y a tout simplement trop d’éléments qui entrent en jeu et assurément une grande diversité d’opinions entre pays. Je l’ai dit, nous sommes en territoire inexploré. Cela dit, nous devons chercher à le faire; c’est ce que nous faisons et nous redoublerons d’effort.

Dans un rapport paru au début du mois, nous avons examiné les retombées des politiques monétaires non conventionnelles. D’après nos estimations, les assouplissements quantitatifs de la Fed ont probablement abaissé le rendement à long terme des obligations américaines de plus de 100 points de base avant la correction du marché au début de l’année, ce qui a dopé la production mondiale de plus de 1 %. Je sais que les estimations varient. Mais nous croyons pouvoir dire que les politiques monétaires non conventionnelles ont soutenu l’activité alors que la dépression mondiale menaçait.

Les indicateurs du risque de marché vont dans le même sens, qui font état d’une réduction de l’incertitude sur les marchés pendant les périodes de fortes tensions financières. Ainsi, la probabilité de variations extrêmement prononcées des prix a diminué sur plusieurs marchés immédiatement après les mesures non conventionnelles de la Fed.

Naturellement, c’est pendant les premières phases, lorsque la situation était la plus grave, que ces politiques ont produit le plus d’effets positifs. Mais même depuis lors, les politiques non conventionnelles ont été une réussite incontestable. Globalement, elles ont bénéficié à tous les pays, tout d’abord en faisant disparaître les risques les plus graves de turbulences financières, ensuite en stimulant la croissance.

Il n’en sera peut-être pas toujours ainsi à l’avenir.

2. L’algèbre mondiale actuelle des politiques monétaires non conventionnelles

Cela m’amène à mon point suivant : où en sont aujourd’hui les politiques monétaires non conventionnelles?

Je le dis d’emblée, je ne suggère pas de les abandonner précipitamment. Elles sont encore utiles partout où elles sont en place, et devront peut-être être maintenues plus longtemps dans certains pays que dans d’autres. En Europe par exemple, elles peuvent être encore très utiles. Au Japon aussi, un retrait n’est sans doute pas d’actualité.

Le jour viendra où cette période de politique monétaire exceptionnellement souple, faisant appel à des instruments conventionnels et non conventionnels, devra prendre fin au vu de la reprise économique et de ses effets sur l’inflation. Nous devons nous y préparer, d’autant plus que nous ne savons pas exactement quand ce jour viendra.

Une chose est sûre : le retrait sera, et devra être, fonction du rythme de la reprise, cette dernière atténuant les effets négatifs potentiels du retrait.

Cela dit, l’algèbre ne sera pas facile. Tous ensemble, nous devons avoir constamment à l’esprit la stabilité financière et la croissance. Tous ensemble, nous devons voir si les avantages de la politique monétaire non conventionnelle sont soumis à la loi des rendements dégressifs. Tous ensemble, nous devons déterminer si, sur le plan financier, les effets de ces politiques s’aggravent avec le temps.

Comme ce fut le cas pour l’adoption de ces politiques, leur abandon nous fera entrer dans un territoire inexploré. Mais je reste optimiste. Les banques centrales ont parfaitement maîtrisé l’adoption de ces politiques et je ne vois aucune raison de penser qu’il en irait autrement de leur retrait.

Le FMI et les responsables doivent donc dès maintenant engager une réflexion sur la forme que prendra le retrait des politiques non conventionnelles. Il faut réfléchir à ses implications pour la stabilité économique et financière mondiale, c’est-à-dire pour l’ensemble du système et pas simplement une de ses parties. C’est une question à laquelle le FMI est et restera très attentif. Après tout, c’est sa raison d’être.

Pour l’heure, je voudrais m’arrêter sur quelques aspects des canaux et connexions par lesquels les politiques monétaires non conventionnelles produisent leurs effets.

Premièrement, l’équilibre entre stabilité et prise de risque.

Le rapport entre les deux n’est pas simple. Assurément, de longues périodes de politique monétaire très souple et de taux d’intérêt extrêmement bas, conjuguées à la recherche de rendements plus élevés, pourraient encourager la prise de risques inconsidérés. En même temps, si les banques centrales n’avaient pas eu recours à des mesures non conventionnelles, cela aurait pu facilement se traduire par des taux de croissance moins élevés et aggraver le risque de difficultés financières.

Comme toujours, nous en apprendrons davantage avec le temps. En particulier, nous saurons si la correction du marché mondial plus tôt dans l’année a été un rappel utile des excès de l’exubérance, ou si c’est le début d’une nouvelle période de soubresauts périodiques et de paniques régulières. Nous espérons tous que nous sommes dans la première situation, mais la prudence dicte de se préparer à l’éventualité de la seconde.

Certaines modalités des politiques non conventionnelles influent sur la courbe de rendement à long terme, peut-être davantage que la politique monétaire conventionnelle. Par conséquent, un éventail plus large d’actifs et de catégories d’actifs seraient concernés qu’avec la politique monétaire conventionnelle, ce qui crée une incitation à la prise de risque qui pourrait s’avérer préoccupante.

Tout bien soupesé, il apparaît aujourd’hui que le bilan des politiques non conventionnelles reste à ce jour positif pour les pays qui les appliquent.

Deuxièmement, il faut examiner plus attentivement les retombées.

Il est certes difficile de faire la part des effets des politiques non conventionnelles et des autres facteurs influant sur les résultats économiques. Mais les cycles passés de durcissement monétaire ont engendré des craintes ou des retombées, et nous devons tirer les enseignements du passé.

Jusqu’à présent, les pays avancés et émergents ont généralement bien géré les implications induites par les politiques monétaires non conventionnelles pour la conduite de la politique économique.

Nous travaillons à plusieurs études de cas portant sur treize des principaux pays qui n’ont pas eu recours à des mesures non conventionnelles et qui représentent collectivement environ 40 % de la production mondiale.

Après le lancement des mesures monétaires non conventionnelles, on a assisté à une augmentation des prix des actifs et des flux de capitaux; selon une estimation, les flux nets cumulés vers les pays émergents ont progressé de 1.100 milliards de dollars depuis 2008, soit 470 milliards de dollars au-dessus de la tendance structurelle à long terme. Le levier financier des entreprises et les risques de change se sont aussi accrus dans plusieurs cas. Les prix de l’immobilier ont été particulièrement soutenus, par exemple au Brésil, au Canada, en Chine, en Corée et en Thaïlande. Les cours des actions ont rebondi pendant une longue période en Chine, au Mexique et en Russie. Enfin, l’expansion du crédit a été rapide au Brésil, en Chine, en Corée et en Turquie. Ces derniers mois, certaines de ces évolutions ont été inversées en partie.

Bien sûr, ces tendances positives n’ont rien de surprenant. Ces évolutions auraient été les mêmes avec une politique conventionnelle. Une fois encore, c’est le résultat habituel des taux d’intérêt bas et de la chasse au rendement — les investisseurs recherchent de nouvelles possibilités de placement, les capitaux affluent vers les marchés émergents, avec les résultats que l’on peut attendre en matière d’appréciation de la monnaie et de croissance du crédit.

En général, les pays ont mené une politique macroéconomique de qualité, en prenant des mesures pour rendre leur système financier plus sûr, notamment des mesures macroprudentielles et de gestion des mouvements de capitaux.

Tout cela fait que, au bout du compte, le bilan des politiques non conventionnelles pour les pays qui n’y ont pas recours reste positif. Jusqu’à présent tout au moins.

Nous le savons tous, la situation peut se retourner très vite, comme nous l’avons vu dans certains pays émergents ces derniers jours. Ces risquesappellent une vigilance et une réévaluation constantes.

Troisièmement, une réflexion plus approfondie sur les modalités du retrait des mesures non conventionnelles aiderait à mieux en évaluer les risques et les retombées.

Je poserai tout d’abord une question très simple : qu’entendons-nous par «retrait» des mesures monétaires non conventionnelles? La réponse n’est pas toujours très claire. Nous avons vu beaucoup d’innovations. Pourtant, le conventionnel et le non conventionnel sont souvent imbriqués l’un dans l’autre. Les politiques monétaires d’aujourd’hui ont de nombreux volets, qui vont d’indications sur l’orientation future de la politique monétaire à l’achat d’actifs privés pour promouvoir la stabilité de certains marchés en passant par des achats moins ciblés au titre de l’assouplissement monétaire pour stimuler l’activité de façon plus générale.

À long terme, il va de soi que les mesures non conventionnelles seront éliminées progressivement, puis totalement. Mais cela ne veut pas dire qu’elles seront retirées toutes en même temps.

En effet, il semble probable que certains des aspects plus «conventionnels» de ces mesures, telles que les indications sur l’évolution future des taux directeurs ou les achats futurs d’actifs, seront adaptés bien avant que le moindre actif ne soit vendu. Cela veut dire que, selon toute vraisemblance, le retrait des mesures non conventionnelles sera plus lent et demandera plus de temps qu’on ne le dit souvent, et qu’on le craint.

Il est permis de penser aussi que ce retrait dépendra de l’avancement des autres politiques et de la solidité de la reprise.

En fait, pour que le retrait soit compris et digéré aussi facilement que possible par les marchés, il doit être conditionné à l’affermissement de la reprise.

3. Une meilleure combinaison de politiques à l’échelle mondiale

J’en viens maintenant à mon troisième et dernier point : l’orientation à venir de la politique économique de façon plus générale.

Aussi bonne soit-elle, la politique monétaire ne peut pas tout faire. Elle ne peut pas fournir toutes les réponses. Elle ne peut pas résoudre tous les problèmes économiques; et ce n’est pas vous qui me contredirez sur ce point!

Fondamentalement, les politiques monétaires non conventionnelles doivent être complétées par un ensemble plus large de politiques capables d’assurer le développement de l’économie mondiale.

Revenons un peu en arrière.

Certains observateurs estiment que le FMI s’est montré peu enclin à conseiller les pays qui adoptaient des mesures non conventionnelles de politique monétaire, voire qu’il a été indulgent à leur égard. Je ne suis pas d’accord. Depuis de nombreuses années maintenant, nous insistons sans relâche sur le fait que le dosage de politique économique doit accorder une plus large place aux réformes budgétaires, financières et structurelles à moyen terme. Mais même en l’absence de ces autres politiques, pour souhaitables qu’elles soient, il était préférable de recourir à des mesures monétaires non conventionnelles que de ne pas le faire.

J’ai peur, il est vrai, que les durs efforts des banques centrales se révèlent vains si l’action des pouvoirs publics reste insuffisante sur les autres fronts, c’est-à-dire s’ils n’adoptent pas les politiques, certes plus difficiles, qui s’imposent pour parvenir à une croissance équilibrée, durable et mieux partagée. Je parle ici de tous les pays, pas uniquement de ceux qui ont adopté des mesures monétaires non conventionnelles.

Nous ne saurons jamais précisément ce qui se serait passé en l’absence de ces mesures, mais je dirai ceci : les politiques monétaires non conventionnelles fournissent l’espace nécessaire pour approfondir les réformes. Nous devons utiliser cet espace de façon avisée. Il ne faut pas tomber dans la procrastination.

Pour les pays qui ont opté pour des mesures monétaires non conventionnelles, le bon dosage de politique économique doit avoir deux caractéristiques.

Premièrement, ils doivent approfondir les réformes pour créer les conditions d’une croissance soutenue et durable. Ils ne doivent pas gaspiller l’espace dégagé par la politique monétaire non conventionnelle.

Nous avons besoin de ce large éventail de politiques pour soutenir la croissance à long terme, assurer la viabilité des finances publiques et remettre en état les systèmes bancaires fragilisés.

La combinaison particulière de politiques variera d’un pays à l’autre. Le FMI a déjà eu l’occasion de s’exprimer en détail sur ces questions, tout dernièrement dans le cadre de notre évaluation économique annuelle de plusieurs grands pays. Je n’y reviens donc pas.

Si davantage de progrès peuvent être accomplis sur les autres fronts de la politique économique, les politiques monétaires non conventionnelles n’en seront que plus efficaces, car les risques seront maîtrisés. Cela pourrait aussi faciliter le retrait en douceur des mesures non conventionnelles.

Je prendrai un exemple. Certains pays, en particulier dans la zone euro, doivent encore réparer leur système financier, pour décalaminer les canalisations financières afin que le crédit puisse à nouveau circuler, réduire la fragmentation financière et aider ainsi la politique monétaire à mieux fonctionner.

Plus généralement, une réforme de la réglementation peut contribuer à rendre le système plus sûr. Puisque les politiques monétaires non conventionnelles ont aidé à sauver le secteur financier, il semble raisonnable de demander d’accélérer en retour la réforme du secteur financier.

La seconde caractéristique est que les banques centrales doivent se charger de gérer les risques afférents au retrait des mesures non conventionnelles.

Tout le monde ici comprend l’importance primordiale de la communication. Les décideurs doivent être clairs et ne rien cacher des considérations qui détermineront les décisions concernant les mesures non conventionnelles, tant du point de vue de l’activité économique que de la stabilité financière.

Il est important aussi de parler des risques des deux côtés de l’équation : les risques pour la reprise d’un retrait trop rapide des mesures non conventionnelles, et les risques pour la stabilité financière d’un retrait trop tardif.

Certains craignent à juste titre que l’information sur les conditions financières ne sape la stabilité des marchés. Mais en dire trop peu pourrait être bien pire, les marchés risquant d’être pris par surprise.

Même s’il est bien géré, le retrait des mesures non conventionnelles pourrait imposer aux autres pays, à ceux qui n’ont pas adopté ce type de mesures, une difficile course d’obstacles.

Dans ces conditions, comment ces pays doivent-ils se préparer et réagir?

Pour la plupart, ils ont déjà largement anticipé les risques potentiels. Ils doivent continuer à suivre leur propre chemin. Les actions à mener varieront en fonction de la situation de chaque pays.

Les pays doivent aussi développer leur endurance pour le long terme. Dans les pays qui ont opté pour des mesures non conventionnelles, la politique monétaire a été surchargée en partie du fait que la demande mondiale ne s’est pas encore rééquilibrée.

Les pays qui n’ont pas eu recours à des mesures monétaires non conventionnelles doivent mener avec détermination les politiques de fond décrites dans nos rapports pour promouvoir une croissance durable à moyen terme. Les inquiétudes qui se sont fait jour récemment au sujet du ralentissement de la croissance potentielle dans les pays émergents ne font confirmer cet impératif.

L’autre question, tout aussi importante, est celle de savoir comment réagir en cas de retour de l’instabilité financière, qui exposerait les pays n’ayant pas appliqué de mesures non conventionnelles à de graves risques. La bonne nouvelle est que ces pays disposent des outils pour faire face.

Ils pourront compter sur la souplesse du taux de change, mais pas à n’importe quel prix. Un certain degré d’intervention sur les marchés pourrait contribuer à atténuer l’instabilité des taux de change ou les tensions de liquidité à court terme.

Jusqu’à présent, les pays avancés comme les pays émergents ont eu recours à des mesures macroprudentielles et microprudentielles pour tempérer les excès des marchés, en freinant la croissance exubérante du crédit ou en atténuant les facteurs de vulnérabilité dans le secteur financier. Dans certaines circonstances, la gestion des flux de capitaux a été utile.

Pourtant, en dépit de tous les efforts, une brèche peut apparaître dans la digue. Il faut donc construire de nouvelles lignes de défense, des lignes de défense qui reflètent notre interdépendance, notre objectif commun et notre responsabilité collective envers l’économie mondiale.

À cet égard, les lignes de crédit réciproque, comme celles qu’ont utilisées les grandes banques centrales au début de la crise, peuvent se révéler utiles. Quant au FMI, il se tient prêt à donner des conseils et à fournir un soutien financier, notamment, à titre de précaution, dans le cadre de nos divers instruments.

Mais par-dessus tout, il faut que nous travaillions tous ensemble, et que nous travaillions mieux ensemble.

Conclusion

Voilà notre point d’orgue.

Grâce à la coordination et la coopération internationales, nous pourrons progresser au niveau mondial. Aucun pays n’existe en vase clos. Je l’ai dit en commençant, dans le monde interconnecté d’aujourd’hui, les retombées des politiques nationales, y compris celles des pays qui ont adopté des mesures monétaires non conventionnelles, peuvent fort bien avoir des ramifications qui reviennent jusqu’à leur point d’origine. Chaque pays a intérêt à se soucier des effets de ses actions au-delà des frontières. C’est dans notre intérêt à tous.

Je ne dis pas que ce sera chose facile. La coordination est difficile à mettre en œuvre en pratique.

Les avis divergent quant à l’ampleur et même à la direction des retombées. Il importe de concilier ces points de vue, ou en tout cas de les rapprocher, pour déterminer l’orientation de nos actions futures.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de travailler ensemble dans un esprit d’ouverture. La discussion d’aujourd’hui peut nous aider à avancer dans la bonne direction.

En tant que forum de coopération économique internationale, le FMI peut jouer un rôle utile à cet égard. Il nous appartient en outre de mettre à profit la surveillance pour aider les pays membres à prendre leurs décisions de politique économique. Nous pouvons examiner de façon plus fouillée les interconnexions entre les politiques économiques des pays membres ainsi que leurs retombées. Nous pouvons montrer clairement l’avantage qu’il y a à travailler ensemble. Enfin, nous pouvons encourager les décideurs à concevoir leurs actions en considérant l’ensemble de l’économie mondiale.

Les politiques économiques et leur coordination n’ont pas encore atteint le niveau souhaitable. L’absence d’actions concertées au niveau mondial, chaque pays apportant sa pierre à l’édifice, pourrait menacer la reprise économique mondiale. En agissant, par contre, nous pouvons amener l’économie mondiale sur la voie d’une croissance vigoureuse, durable et équilibrée.

Le monde fait du surplace depuis assez longtemps. Le moment est venu pour les décideurs de nager jusqu’à la rive. Croyez-en l’expérience d’une ancienne championne de natation synchronisée!

Je vous remercie.

DÉPARTEMENT DE LA COMMUNICATION DU FMI

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