Les avantages du partenariat : Allocution pour l'inauguration de l'AFRITAC Centre Allocution de Rodrigo de Rato, Directeur général du Fonds monétaire international, lors de l'inauguration de l'AFRITAC Centre

le 9 janvier 2007

Allocution de Rodrigo de Rato, Directeur général du Fonds monétaire international, lors de l'inauguration de l'AFRITAC Centre
Libreville, Gabon
9 janvier 2007


Texte préparé pour l'intervention

1. Votre Excellence, Mesdames et Messieurs, je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour l'inauguration du Centre d'assistance technique en Afrique centrale.

2. C'est une heureuse occasion qui arrive à un moment prometteur. La croissance économique en Afrique subsaharienne dépassera probablement 5 % cette année pour la troisième année consécutive et les perspectives sont favorables aussi pour l'an prochain. L'inflation moyenne sur le continent, hors Zimbabwe, est inférieure à 10 %, la plus faible depuis 25 ans. Beaucoup de pays ont été poussés par des vents favorables : la croissance de leurs partenaires commerciaux dans le monde entier est vigoureuse, les cours des produits de base sont élevés et l'allégement de la dette a dégagé des ressources supplémentaires pour le développement. Cependant ces résultats restent insuffisants au regards de la pauvreté et de la nécessité de travailler pour atteindre les Objectifs du millénaire. A cette fin, de bons partenariats sont d'une importance cruciale. L'ouverture de ce troisième AFRITAC montre ce qui peut être accompli lorsque les gouvernements africains, les donateurs et le FMI œuvrent ensemble.

3. L'ouverture de ce centre constitue aussi un exemple des enseignements qui peuvent être tirés du passé. Au cours des deux dernières années, le FMI a examiné attentivement comment il travaille avec les pays à faible revenu. Nous avons écouté ce que les donateurs nous ont dit. Nous avons écouté ce que les ONG nous ont dit. Et surtout, nous avons écouté ce que les gouvernements et les populations de nos pays membres à faible revenu nous ont dit. Et nous intégrons ces avis et les enseignements tirés de notre propre expérience dans nos travaux sur les pays à faible revenu. Au fil des ans, nous avons appris que l'assistance technique est la plus précieuse lorsque ceux qui la fournissent collaborent étroitement avec ceux qui la sollicitent et qu'il est important de répondre rapidement aux appels à l'aide des pays. Les centres d'assistance technique du FMI concrétisent ce constat et répondent à ce besoin. Nous avons aussi appris que le programme d'assistance technique doit être pris en charge par les pays, et cette prise en charge apparaît sous de nombreuses formes dans l'AFRITAC Centre. Nous l'observons dans l'aide financière qui est offerte par les pays qui seront desservis par le centre, dans la participation active des représentants des pays au comité d'orientation qui établit le programme de travail du centre, dans les bureaux et le soutien fournis par le gouvernement du Gabon, et dans la présence aujourd'hui de dirigeants qui sont déterminés à œuvrer ensemble pour améliorer la vie de leur population.

4. Nous avons écouté vos conseils, nous avons tiré les enseignements de notre expérience et nous adaptons la manière dont nous traitons avec nos pays membres à faible revenu. Nous avons un objectif précis qui a été arrêté par la communauté internationale : aider les pays à faible revenu à atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Nous disposons d'un plan précis qui est énoncé dans la stratégie à moyen terme du FMI. Et nous mettons en œuvre cette stratégie.

5. À Singapour, par exemple, nos pays membres ont voté à une majorité écrasante en faveur de réformes de la gouvernance. Ces réformes sont la première étape d'un processus qui rehaussera la représentation de nombreux pays émergents, afin de prendre en compte leur poids croissant dans l.économie mondiale. Et par ailleurs — ce n'est pas moins important — les gouverneurs sont convenus que nous devons renforcer la participation et la représentation des pays à faible revenu qui continuent d'emprunter auprès du FMI, mais n'ont qu'une part limitée des voix au sein de l'institution. Nous soumettrons prochainement à notre Conseil d'administration un rapport expliquant comment y parvenir en accroissant le nombre de « voix de base », ces voix auxquelles tous les pays ont droit, quelle que soit leur taille économique. Et nous examinons les moyens d'aider les pays à faible revenu d'Afrique à faire entendre leur voix plus clairement, en augmentant les effectifs des bureaux qui travaillent pour les administrateurs représentant les pays africains.

6. Nous mettons aussi en œuvre des réformes de fond qui ont une incidence particulièrement importante sur les pays à faible revenu. En novembre, notre Conseil d'administration est convenu de modifier notre cadre de viabilité de la dette, et j'examinerai ces changements plus en détail dans quelques minutes. En outre, nous nous employons en permanence à aider plus efficacement les pays à faible revenu en nous concentrant sur ce que le FMI fait le mieux et sur les tâches où sa contribution peut être la plus importante. Permettez-moi de décrire quelques-unes de ces tâches.

7. Une des principales responsabilités du FMI est d'aider les pays à concevoir et à appliquer des politiques qui assurent la stabilité macroéconomique. C'est la condition préalable à une croissance durable et à une réduction de la pauvreté. Dans nos prêts, nos conseils et notre assistance technique, nous continuerons de privilégier les politiques et les institutions qui sont essentielles pour la stabilité économique et financière, en particulier les politiques budgétaires, monétaires et de change. L'accent qui est mis dans les travaux de l'AFRITAC Centre sur la gestion financière publique, l'administration des recettes, le contrôle bancaire, la gestion de la dette et les statistiques macroéconomiques reflète clairement cette priorité.

8. Une autre responsabilité importante du FMI reste de contribuer activement à aider les pays à tirer parti d'une hausse des entrées de capitaux, qu'elles proviennent des exportations de produits de base, de l'allégement de la dette, de l'aide officielle ou de flux de capitaux privés. Nous pouvons aider les pays à gérer les effets macroéconomiques d'une augmentation des entrées de capitaux afin qu'ils puissent utiliser autant de ces capitaux que possible. Nous pouvons aider les pays à mieux gérer leurs dépenses publiques. Et nous pouvons les aider à créer l'espace budgétaire nécessaire pour améliorer les infrastructures physiques et développer leurs programmes sociaux, en particulier dans la santé et l'éducation. Depuis de nombreuses années, les programmes appuyés par le FMI mettent l'accent sur la nécessité de préserver les dépenses consacrées à la lutte contre la pauvreté, en particulier les dépenses d'éducation et de santé, y compris en période d'austérité budgétaire. Les donateurs soutiennent ces objectifs aussi. Lorsque des dons supplémentaires sont accordés pour ces dépenses, les objectifs budgétaires des programmes appuyés par le FMI seront ajustés de manière à assurer que ces fonds sont utilisés intégralement, pourvu que cela ne compromette pas la stabilité macroéconomique.

9. Bien entendu, avant de pouvoir être utilisée, l'aide doit être fournie. Des besoins énormes devront être satisfaits pour que les pays à faible revenu se rapprochent sensiblement des objectifs du Millénaire pour le développement. Mais, jusqu'à présent, les promesses d'une augmentation de l'aide de la part des pays donateurs restent des promesses, sans plus. En 2005, selon une récente enquête du Comité d'aide au développement de l'OCDE, l'aide à l'Afrique subsaharienne, hors allégement de la dette, a diminué en valeur réelle. Il est essentiel que les donateurs tiennent leurs promesses. Il est crucial aussi qu'ils s'engagent rapidement et de manière prévisible à fournir de l'aide. L'un des domaines où les gouvernements et le FMI rencontrent le plus de problèmes, c'est la prévision du niveau des apports d'aide et l'élaboration de politiques macroéconomiques sur la base de ses projections. De temps à autre, les flux d'aide effectifs ont dépassé les prévisions et les objectifs macroéconomiques initiaux se sont avérés plus étriqués que nécessaire. Nous pouvons intégrer une aide plus élevée dans la conception de nos programmes, mais ce ne sera utile que si une aide plus volumineuse est effectivement fournie.

10. La communauté internationale a tenu ses promesses en matière d'allégement de la dette. Le FMI a accordé un allégement de la dette de 100 % à 21 pays pauvres. Avec l'allégement attendu de la part de l'IDA et du Fonds africain de développement, l'allégement total de la dette au titre de l'initiative d'allégement de la dette multilatérale avoisinera 50 milliards de dollars.

11. L'allégement de la dette ouvre des perspectives, mais il crée aussi un problème particulier pour les pays à faible revenu, et le FMI peut les aider à le régler. Il est légitime que les pays souhaitent utiliser la capacité d'emprunt créée par l'allégement de la dette pour accélérer leurs progrès vers les objectifs du Millénaire pour le développement. Mais les gains durement acquis de l'allégement de la dette risquent d'être perdus si les pays concernés empruntent pour financer des dépenses qui n'améliorent pas leur situation économique. Personne ne souhaite répéter l'expérience des années 70 et 80 lorsque de nouveaux emprunts ont été contractés aux conditions du marché, souvent à des fins improductives, avec pour résultat un héritage de dette et de méfiance. Mais une nouvelle génération de créanciers, qui n'est pas passée par là, risque de répéter l'expérience. Il est dans l'intérêt tant des créanciers que des débiteurs d'éviter une accumulation excessive de dettes. Il est donc important que les pays en développement, les créanciers potentiels — officiels ou privés — ainsi que le FMI et la Banque mondiale œuvrent ensemble pour veiller à ce que les chances offertes par l'allégement de la dette soient saisies, à ce que l'endettement ne redevienne pas insoutenable et à ce que les nouvelles ressources ne soient pas gaspillées ou mal utilisées.

12. C'est pourquoi, dans le cadre de la stratégie à moyen terme, nous avons modernisé récemment notre cadre de viabilité de la dette. Nous disposons maintenant d'une base plus solide pour nos projections de croissance, parce que des projections de croissance trop optimistes ont souvent donné aux pays un faux sentiment de confort à propos de l'augmentation de leur dette. Nous avons prévu des signaux d'alerte lorsque l'accumulation prévue de la dette est anormalement forte. Nous encourageons les créanciers à utiliser le cadre de viabilité de la dette, ainsi qu'à mieux communiquer et coordonner leur action entre eux et avec les emprunteurs. Nous aidons aussi les pays emprunteurs, notamment au moyen d'une assistance technique, à utiliser le cadre révisé afin de concevoir leur propre stratégie de gestion de la dette. Une partie de l'assistance technique qui sera fournie par l'AFRITAC Centre concernera la gestion de la dette.

13. Permettez-moi maintenant d'évoquer brièvement deux autres domaines où je pense que le FMI peut aider les pays à faible revenu à réaliser une croissance soutenue et à faire reculer la pauvreté. Le premier est le développement du secteur financier et le second, le commerce.

14. L'un des éléments principaux de la stratégie à moyen terme du FMI est la prise de conscience qu'il est de plus en plus important de bien comprendre les dernières évolutions des secteurs financiers du fait de la mondialisation des mouvements de capitaux. Des systèmes financiers développés et efficients sont essentiels aussi pour la croissance économique. Mais le secteur financier est sous-développé dans la plupart des pays à faible revenu. Lorsqu'ils ne peuvent pas accéder aux marchés financiers formels, les démunis n'ont que les services informels — les usuriers et les intermédiaires qui traitent les envois de fonds — qui sont souvent très coûteux. Le développement du secteur financier peut promouvoir la croissance et faire reculer la pauvreté en éliminant les obstacles au crédit. Il s'agit d'une priorité pour les pays à faible revenu et pour le FMI, et c'est pourquoi, dans le cadre de notre surveillance, nous accordons une attention accrue aux secteurs financiers, aux marchés financiers et aux marchés de capitaux.

15. En ce qui concerne le commerce, l'essentiel du débat ces derniers mois a concerné les négociations du cycle de Doha. C'est opportun : l'expansion du commerce, facilitée par des accords multilatéraux, est une pierre angulaire de la croissance de l'économie mondiale depuis de nombreuses années et elle est fondamentale pour les perspectives des pays à faible revenu. Mais nous devons aussi garder à l'esprit les avantages qui peuvent résulter d'une réforme commerciale dans les pays en développement eux-mêmes. Quelle que soit l'issue des négociations multilatérales, les pays à faible revenu peuvent tirer parti d'une réforme de leur propre régime de commerce, notamment en accélérant l'intégration régionale.

16. À ce propos, les avantages d'une expansion du commerce sont maximisés s'ils s'accompagnent d'une amélioration du cadre réglementaire. Une bonne partie des avantages de l'ouverture aux échanges provient d'une plus grande spécialisation, qui accroît le rendement de l'investissement, et d'une croissance de la productivité au sein des branches d'activité — les entreprises mal gérées quittent le marché et les entreprises efficientes y entrent et se développent. Selon des études récentes, un accès au marché facile pour les nouvelles entreprises, un marché du travail souple et des droits de propriété transparents et applicables sont particulièrement importants pour que les avantages du commerce soient réalisés, et la facilité avec laquelle une entreprise peut être créée est le facteur primordial. Bien entendu, nous savons depuis longtemps que ces questions institutionnelles sont importantes en tant que telles. Il semble maintenant qu'elles soient aussi importantes pour que la réforme commerciale produise des avantages significatifs.

17. J'en reviens ainsi à l'importance du renforcement des capacités. Le FMI consacre environ un quart de son budget au renforcement des capacités, notamment ses travaux sur les normes et les codes, la formation de fonctionnaires des pays membres et surtout l'assistance technique. Celle-ci constitue un élément fondamental de l'aide accordée par le FMI à de nombreux pays. Son importance doit être reconnue, elle doit être déployée de manière efficiente et doit être bien utilisée. Je suis convaincu qu'en mettant en place les centres régionaux d'assistance technique, et en particulier les trois centres qui existent aujourd'hui en Afrique, nous appliquons la bonne stratégie. Ces centres montrent ce qui peut être accompli lorsque les donateurs, les pays en développement et le FMI œuvrent ensemble. Ils faciliteront la mise en place d'institutions solides, rehausseront la croissance et amélioreront le niveau de vie.

18. Pour conclure, je vous remercie tous du rôle que vous avez joué dans la création de l'AFRITAC Centre. Je tiens à remercier les représentants des pays membres au Conseil d'administration qui ont appuyé l'AFRITAC, la Banque africaine de développement et les gouvernements de la France et de l'Allemagne qui ont contribué financièrement, et surtout les pays bénéficiaires qui ont apporté des contributions substantielles, et en particulier le gouvernement du Gabon, nos hôtes. Comme je l'ai dit au début, c'est une heureuse et prometteuse occasion, et c'est à vous que nous la devons.

19. Je vous remercie de votre attention.

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