Typical street scene in Santa Ana, El Salvador. (Photo: iStock)

(photo : Sultan Mahmud Mukut/SOPA Image/Newscom)

Bulletin du FMI : L’économie marocaine est en bonne voie

le 23 février 2015

  • L’économie gagne en vigueur, avec une prévision de croissance de 4,4 % en 2015
  • Réduction sensible des vulnérabilités extérieures et budgétaires
  • Il est essentiel d’améliorer le climat des affaires, les infrastructures, l’éducation et l’accès au crédit pour créer des emplois et combattre la pauvreté

L’économie marocaine se porte mieux, grâce aux nets progrès des réformes, mais il faut poursuivre les efforts afin de préserver les acquis et de promouvoir une croissance plus forte et inclusive, indique le FMI à l’issue du dernier bilan annuel de l’état de santé du pays et de la première revue de la ligne de liquidité obtenue par le Maroc en 2014.

Cours de couture à Casablanca (Maroc). Des réformes visant à améliorer le climat des affaires, à promouvoir les petites entreprises et à investir dans l’éducation sont nécessaires pour créer des emplois dans le pays (photo: Youssef Boudlal/Corbis)

Cours de couture à Casablanca (Maroc). Des réformes visant à améliorer le climat des affaires, à promouvoir les petites entreprises et à investir dans l’éducation sont nécessaires pour créer des emplois dans le pays (photo: Youssef Boudlal/Corbis)

BILAN DE SANTÉ ÉCONOMIQUE

Dans un entretien accordé au Bulletin du FMI, le chef de mission du FMI pour le Maroc, Jean-François Dauphin, explique que des progrès considérables ont été accomplis; l’économie reste cependant exposée à des risques considérables qui exigent une mise en œuvre résolue des réformes. Le FMI soutient le programme économique des autorités par le biais d’une ligne de précaution et de liquidité, qui fait office de police d’assurance pour protéger l’économie en cas de grave dégradation de la conjoncture extérieure.

Bulletin du FMI : comment se porte l’économie marocaine?

J.-F. Dauphin : Les déséquilibres économiques se sont considérablement résorbés au cours des trois dernières années. Après les redoutables chocs exogènes subis en 2011-12, les autorités ont mis en œuvre un ensemble de réformes avec l’appui d’une ligne de précaution et de liquidité du FMI, afin de remédier aux vulnérabilités économiques. Elles sont notamment parvenues à réduire sensiblement le déficit budgétaire et ont procédé à une impressionnante réforme du système de subventions.

De ce fait, le déficit extérieur courant a aussi diminué et les réserves de change se sont accrues. L’émergence de nouveaux secteurs exportateurs et la récente baisse des cours du pétrole sur le marché international ont aussi contribué à ce processus de rééquilibrage.

En novembre 2014, les autorités ont adopté une nouvelle loi organique relative à la loi de finances qui — une fois que les commentaires de la Cour constitutionnelle auront reçu une réponse — devrait renforcer et moderniser le processus budgétaire. Une nouvelle loi bancaire qui élargit les pouvoirs de régulation et de supervision de la banque centrale marocaine a également été adoptée.

Néanmoins, le taux global de chômage restait élevé à fin 2014, à 9,7 %, et celui des jeunes avoisinait 20 %. Il reste en outre beaucoup à faire pour réduire les inégalités en matière de revenu, entre hommes et femmes et entre régions.

Bulletin du FMI : comment voyez-vous les perspectives économiques du pays?

J.-F. Dauphin : Nous nous attendons à un affermissement continu de l’économie. Le taux de croissance devrait atteindre environ 4½ % en 2015, l’inflation devrait rester faible (autour de 1½ %) et le déficit budgétaire continuera à se réduire. À supposer que la mise en œuvre de réformes structurelles se poursuive de manière énergique, la croissance pourrait s’accélérer et atteindre un rythme de 5-5½ % à moyen terme.

Le Maroc n’est cependant pas à l’abri de gros risques. Une période prolongée de croissance lente en Europe — le principal partenaire commercial du Maroc — peut se traduire par une baisse des exportations, des investissements directs étrangers, du tourisme et des envois de fonds de l’étranger. Une nouvelle flambée de cours de l’énergie, imputable aux tensions géopolitiques au Moyen-Orient ou au bras de fer entre la Russie et l’Ukraine pourrait aussi alourdir la facture pétrolière. Un accès de volatilité des marchés financiers mondiaux aurait aussi un impact négatif sur l’économie. En outre, il sera important d’entretenir l’appui social aux réformes.

Bulletin du FMI : en juillet 2014, le FMI a approuvé un deuxième accord au titre de la ligne de précaution et de liquidité d’un montant équivalent à 5 milliards de dollars. À quoi sert cet accord et pourquoi est-il adapté à la situation du Maroc?

J.-F. Dauphin : L’accord au titre de la ligne de précaution et de liquidité (LPL) a pour vocation de répondre aux besoins de liquidités potentiels des pays membres comme le Maroc, qui ont une situation économique foncièrement solide et de bons antécédents, mais qui restent exposés à des facteurs de vulnérabilité et de risque.

Le FMI a créé cet instrument en 2011 comme police d’assurance face à une conjoncture extérieure défavorable échappant au contrôle des autorités des pays membres.

Il s’agit du deuxième accord de ce type passé entre le Maroc et le FMI depuis le début de la crise mondiale, à l’appui du programme de réformes économiques élaboré par les autorités. Celles-ci ont traité le premier accord à titre de précaution et n’ont pas fait appel aux ressources disponibles. De la même manière, elles n’entendent pas non plus effectuer de tirages au titre du second. Le FMI vient d’achever la première revue du programme des autorités, qui se maintient dans la voie tracée.

Bulletin du FMI : quels sont les grands dossiers économiques que le Maroc doit encore traiter?

J.-F. Dauphin : Les autorités marocaines ont déployé de louables efforts pour maintenir la stabilité macroéconomique en dépit d’une conjoncture extérieure difficile.

Mais, au vu des risques déjà mentionnés, il sera essentiel de poursuivre fermement les réformes pour consolider les acquis de la stabilité macroéconomique. Malgré les progrès accomplis au cours de la dernière décennie, il faut redoubler d’efforts pour promouvoir une croissance plus forte et inclusive en réduisant le chômage et l’incidence de la pauvreté.

Il est nécessaire de réduire encore le déficit budgétaire pour placer fermement la dette publique sur une trajectoire descendante. Et la réforme des retraites, dont la mise en œuvre a été délicate, devient de plus en plus urgente.

Il est indispensable de poursuivre les réformes visant à renforcer la compétitivité de l’économie en améliorant davantage le climat des affaires, en favorisant l’accès des ménages et des PME au crédit, en améliorant la gouvernance et la transparence et en investissant dans les infrastructures et l’éducation. L’assouplissement du régime de change aiderait en outre l’économie à mieux absorber les chocs et à promouvoir la diversification des flux économiques et financiers. Il importe en outre de veiller à ce que le fonctionnement du marché du travail favorise la création d’emplois dans le secteur privé.

Le programme de réformes des autorités vise à relever ces défis. Pour sa part, en sus de la ligne de liquidité, le FMI continue à fournir au Maroc conseils et assistance technique, afin de l’aider à assurer la stabilité économique et la progression du niveau de vie.