Les dépenses de santé publique dans les programmes appuyés par le FMI : un nouvel éclairage

Benedict Clements, Sanjeev Gupta, et Masahiro Nozaki
21 décembre 2014

Les améliorations de la santé peuvent avoir un effet extraordinairement positif sur le bien-être social et le niveau d’activité économique. Selon le rapport novateur de 2013 de la Commission Lancet, il est effectivement possible d’attribuer près de 11% de la croissance économique de ces dernières décennies aux améliorations de la santé. Il est donc tout à fait logique que les macro-économistes s’intéressent aux indicateurs de santé et à leurs déterminants, notamment les dépenses de santé publique.

Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que l’impact des programmes appuyés par le FMI sur les dépenses de santé publique ait considérablement suscité l’attention. De précédents travaux de recherche, axés sur les périodes précédant la crise financière mondiale, montrent que les programmes appuyés par le FMI ont un effet positif sur les dépenses de santé publique (Martin et Segura, 2004; Centre pour le développement mondial, 2007; Clements, Gupta et Nozaki, 2013). Mais cet effet se maintient-il si nous prolongeons l’analyse aux années plus récentes? Dans ce blog, nous apportons un nouvel éclairage sur ces données pour les pays en développement.

À partir de nos estimations de l’évolution entre 2003 et 2012, nous constatons le maintien des grandes caractéristiques que nous avions identifiées dans notre précédente analyse empirique revue par les pairs : les dépenses augmentent plus rapidement dans les pays bénéficiant d’un programme appuyé par le FMI que dans les pays sans programme (graphique 1). Nous voyons par exemple que la part des dépenses de santé dans le PIB s’est accrue à un rythme annuel plus rapide dans les pays suivant un programme appuyé par le FMI. Cela est particulièrement vrai pour les pays à faible revenu (qui ne paient pas d’intérêt au titre de ces programmes) ainsi que pour ceux d’Afrique subsaharienne. Sur une période de 10 ans, il existe un écart cumulé important entre les pays à faible revenu avec programme appuyé par le FMI et les autres: près de 0,6 points de pourcentage du PIB. Selon notre analyse économétrique de 2013, si nous intégrons les facteurs macroéconomiques qui influent sur les dépenses de santé, l’impact est pratiquement doublé.

Les programmes appuyés par le FMI s’avèrent avoir le même type d’effets si l’on mesure les augmentations de dépenses par d’autres méthodes : les dépenses réelles de santé par habitant, par exemple, ont augmenté en moyenne de près de 6½% par an dans les pays à faible revenu appuyés par un programme, contre environ 4½% par an en moyenne dans les pays sans programme. Si l’on mesure l’évolution entre le début de la crise financière mondiale en 2008, et 2012, on retrouve un résultat analogue. Dans les pays durement frappés par le virus Ebola, on enregistre également des hausses plus fortes de dépenses (en pourcentage du PIB) durant les périodes de programmes appuyés par le FMI : hausses de 0,7 point de pourcentage pour la Guinée, de 1,6 point pour le Libéria et de 0,24 point pour la Sierra Leone (entre 2010 et 2013).

Pourquoi les programmes appuyés par le FMI ont-ils un effet positif sur les dépenses de santé? Comme nous le suggérions dans nos précédents travaux, cela tient, entre autres, à l’accent que mettent ces programmes sur les réformes fiscales, qui augmentent les recettes et permettent d’aider les pays à accroître les dépenses sociales sans compromettre la viabilité budgétaire. En outre, dans la mesure où les programmes entraînent une plus forte croissance économique, ces programmes appuyés par le FMI peuvent contribuer à dégager la marge de manœuvre budgétaire nécessaire (notamment en assurant une hausse plus solide des recettes) pour financer ces dépenses. Une autre raison est l’effet catalyseur des programmes appuyés par le FMI sur le financement des bailleurs de fonds, qui permet aussi d’élargir l’éventail de ressources disponibles pour financer les dépenses prioritaires tant en matière de santé que dans d’autres domaines. Plus récemment, l’ajout dans les programmes appuyés par le FMI de seuils minima de dépenses sociales a également incité les pays à augmenter les dépenses de santé. Le Bureau indépendent d’évaluation du FMI a observé que sur 30 programmes récents, 29 ont intégré ces seuils minima (BEI, 2014).

En conclusion, les données récentes continuent d’indiquer que les programmes appuyés par le FMI sont compatibles avec les projets des pays d’augmenter leurs dépenses publiques de santé. La hausse des dépenses de santé n’est bien entendu qu’un morceau du puzzle pour aboutir à une amélioration des résultats de santé : les pays doivent aussi se consacrer en particulier à des réformes qui permettent d’améliorer l’efficience de ces dépenses, dans la mesure où de telles améliorations sont possibles (Coady, Francese, et Shang, 2014).



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