Dialogue FMI-Jeunes Compte rendu de la table ronde organisée à l’École supérieure des sciences économiques et commerciales de Tunis
Le 10 mars 2010Un groupe de 30 étudiants s’est entretenu avec deux représentants des services du FMI de ce que devraient être les priorités économiques du gouvernement tunisien, des enseignements de la crise économique mondiale, de la manière dont ils envisagent l’avenir économique et du rôle que le FMI devrait jouer dans leur pays. Le chômage était sans surprise le sujet qui préoccupait le plus les étudiants, et plusieurs d’entre eux ont proposé des solutions novatrices au problème.
La Tunisie est un cas relativement à part, a noté l’un des professeurs avant le début de la séance. En effet, alors que le taux de chômage global est d’environ 14 %, celui des jeunes détenteurs d’un diplôme universitaire est proche de 24 %. Il était donc naturel que les étudiants prenant part au débat se soucient des moyens d’améliorer les chances d’emploi des jeunes.
Les étudiants ont souligné que le manque de correspondance entre les qualifications requises sur le marché du travail et les compétences acquises à l’école et à l’université pose un gros problème en Tunisie, comme dans d’autres pays de la région. Les cursus des universités et des établissements d’enseignement professionnel devraient mettre davantage l’accent sur « l’employabilité », ont-ils observé.
Au vu de la pénurie d’emploi dans les sociétés existantes, beaucoup d’étudiants pensaient qu’une solution consisterait à promouvoir l’esprit d’entreprise. L’État devrait aider les jeunes à monter leur propre affaire, et les banques devraient proposer des prêts à faible taux d’intérêt — ou même libres d’intérêts — à ceux qui souhaitent créer une entreprise. Un étudiant a fait remarquer que le soutien financier ne suffit pas; les jeunes ont aussi besoin d’une assistance technique et d’un suivi assurés par des hommes d’affaires expérimentés, pour éviter les embûches courantes dans la vie d’une entreprise.
D’autres étudiants ont suggéré que le gouvernement tunisien devrait abaisser l’âge de la retraite, de sorte que la vieille génération cède la place aux jeunes et leur donne une chance. L’État pourrait aussi offrir aux entreprises des incitations fiscales pour qu’elles embauchent des jeunes. Troisième proposition : les pouvoirs publics pourraient lancer des projets dans les zones rurales, ce qui aurait le double avantage de créer des emplois et de ralentir l’exode rural.
Un étudiant a fait remarquer à juste titre que le taux de croissance de la Tunisie est actuellement aux environs de 5 % et le taux de chômage de 14 %. Pour abaisser sensiblement le chômage, a-t-il déclaré, il faudrait que le taux de croissance augmente de 10 %. Afin de réaliser un tel exploit — qui reviendrait à égaler la croissance météorique de la Chine — le gouvernement tunisien devrait faire porter ses efforts sur les activités à forte valeur ajoutée, telles que les technologies de l’information et les communications.
Une question récurrente était de savoir comment amener les compagnies étrangères à investir en Tunisie. Un étudiant a suggéré qu’il faudrait abaisser le taux d’intérêt, qui est élevé en comparaison de ceux des pays avancés, pour encourager les sociétés étrangères à venir s’implanter dans le pays. Le gouvernement devrait aussi s’efforcer d’améliorer le climat des affaires, ce qui est essentiels pour attirer les investisseurs. Selon d’autres étudiants, il faut aussi améliorer les infrastructures — routières, par exemple — et prendre d’autres mesures propres à inciter les sociétés étrangères à investir en Tunisie.
S’agissant des enseignements de la crise économique mondiale, les étudiants ont noté que la crise a fait ressortir la nécessité de promouvoir une culture de l’épargne au lieu d’une culture du crédit. Selon un étudiant, une économie socialiste pourrait être plus viable qu’une économie capitaliste, et le pays devrait envisager d’adopter un régime hybride.
À la question de savoir s’ils avaient une vue pessimiste ou optimiste de l’avenir économique, les étudiants ont apporté des réponses divergentes, mais la plupart penchaient du côté de l’optimisme. Une étudiante a déclaré qu’elle avait une perspective positive car elle voyait l’économie de la connaissance prendre forme en Tunisie, ce qui lui donnait de l’espoir pour l’avenir. D’autres ont évoqué un ensemble de « mégaprojets » récemment mis en chantier — de gros projets d’investissement financés par les Émirats arabes unis (tels que Tunis Sports City, un gigantesque complexe sportif et «Porte de la Méditerranée», un vaste ensemble de logements résidentiels et de bureaux comportant des centres civiques, des piscines et des terrains de golf) — qui leur font voir l’avenir avec optimisme.
Pour ce qui est du rôle du FMI, les étudiants ont proposé qu’il devienne la banque centrale du monde. De cette manière, il continuerait à remplir ses fonctions actuelles, mais se chargerait aussi d’imposer une réglementation prudentielle qui serait applicable dans le monde entier.