Les enjeux de la nouvelle économie financière: Les efforts déployés par le FMI pour réduire les risques de crises financières -- Déclaration de Flemming Larsen, Directeur du Bureau européen du FMI

le 15 novembre 2001

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Les enjeux de la nouvelle économie financière : Les efforts déployés par le FMI pour réduire les risques de crises financières

Déclaration de Flemming Larsen,
Directeur du Bureau européen du FMI,
devant la réunion conjointe de la Commission des Finances de l'Assemblée Nationale et le Haut Conseil de la Coopération Internationale
Paris, le 15 novembre 2001

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres de la Commission des Finances et du Haut Conseil de la Coopération Internationale, je voudrais d'abord vous remercier de m'avoir invité à prendre part à ces auditions. Mes remarques liminaires situeront l'action du Fonds Monétaire International dans le contexte de l'évolution du système monétaire international et j'évoquerai les réformes en cours pour permettre le FMI et nos pays membres à faire face aux enjeux d'un système financier international de plus en plus intégré.

Une nouvelle économie financière

L'expression «nouvelle économie» désigne habituellement la révolution des technologies de l'information et des télécommunications (TIC) et la formidable amélioration de la productivité et du bien-être qui en découlent. Une autre révolution économique s'est amorcée voici déjà plusieurs dizaines d'années; comme pour la révolution des TIC, il faudra encore quelque temps avant que tous les bienfaits s'en fassent sentir. Il s'agit de l'avènement d'une nouvelle économie financière.

Depuis les années 70, les réformes économiques ont progressivement transformé les systèmes financiers de par le monde et entraîné une extraordinaire expansion du rôle des forces du marché dans la formation des prix et l'affectation des ressources financières. Cette nouvelle économie financière a vu éclore toutes sortes de nouveaux instruments financiers. Elle se caractérise aussi par une mondialisation rapide et un degré d'intégration sans précédent des marchés de capitaux internationaux. Il y a de fortes chances pour que l'intégration soit de plus en plus poussée à mesure que la révolution financière se poursuit.

Des bénéfices considérables ...

La nouvelle économie financière engendre d'énormes bénéfices, tant pour les ménages que pour les entreprises. Par exemple, les particuliers qui épargnent en vue de leur retraite ou les caisses de retraite qui gèrent les cotisations des entreprises et de leurs salariés ont une palette bien plus large de choix de placements entre des actifs nationaux ou internationaux, ce qui leur permet d'obtenir de meilleurs taux de rendement. Les entreprises, pour leur part, peuvent plus aisément financer les projets prometteurs et la nécessaire expansion de leurs capacités. Les ressources financières sont donc investies plus efficacement, d'où une croissance économique plus forte et de plus hauts niveaux de la vie pour tous. C'est pour recueillir ces bénéfices que tant de pays ont libéralisé leurs systèmes financiers et démantelé les restrictions aux mouvements des capitaux.

En outre, cette transformation du système financier signe la disparition du contrôle de l'État qui était la règle depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale jusqu'aux années 70 ou 80—et parfois bien plus longtemps. Les systèmes financiers contrôlés par l'État étaient fortement réglementés et conçus pour canaliser les ressources financières vers les secteurs et les objectifs ayant la faveur des pouvoirs publics. Bien que parfois sujets à des crises—qui obligeaient le pays à dévaluer —ils semblaient assez stables. Or, cette stabilité était chèrement acquise puisqu'elle avait pour contrepartie un manque de concurrence, des coûts d'intermédiation financière élevés et une affectation inefficace ou malavisée de ressources financières limitées. À la longue, deux graves défauts sont devenus de plus en plus flagrants : d'une part, la tentation pour le gouvernement de financer des déficits budgétaires croissants au moyen de l'épargne plus ou moins captive à laquelle il avait un accès privilégié; d'autre part, l'incapacité des systèmes réglementés à sanctionner une politique économique génératrice d'une inflation élevée. La libéralisation financière a aussi eu pour effet de faire payer très cher aux gouvernements les errements de la politique budgétaire ou monétaire—et c'est là un des avantages cruciaux d'un système financier soumis aux règles du marché.

...et de nouveaux (et de moins nouveaux) enjeux

Si les avantages du libre jeu des forces du marché sont si évidents, pourquoi a-t-on éprouvé le besoin d'instituer un système réglementé? Pourquoi la libéralisation ne s'est-elle pas faite plus tôt? Il est bon de rappeler ici que le contrôle de l'État avait été imposé en réaction aux insuffisances du système libéral prévalant à l'époque de l'étalon or, avant la Première Guerre Mondiale : l'instabilité économique et une foule de problèmes sociaux. Ainsi que des dispositifs de protection sociale et l'utilisation active de la politique macroéconomique à des fins de stabilisation, les systèmes réglementés étaient une réaction aux faillites bancaires et aux crises économiques de la Grande Dépression. La défiance implicite à l'égard des forces du marché a donc inspiré les stratégies économiques adoptées après la Seconde Guerre Mondiale et s'est perpétuée dans tous les pays industrialisés pendant plusieurs décennies. Les marchés sont peu à peu rentrés en grâce depuis le début des années 70, où l'on a commencé à rechercher d'autres orientations face au ralentissement brutal de la croissance économique, à la montée en flèche du chômage et à la flambée de l'inflation.

Dans cette perspective historique, il n'est peut-être pas surprenant que le retour à un système de marché semble s'accompagner d'un degré relativement élevé de volatilité financière. S'il est indéniable que le libre jeu des forces du marché comporte plus de risque à cet égard, il y a de nombreux moyens d'éviter que la volatilité ne dégénère en crise financière, et de limiter la gravité des crises lorsqu'elles se produisent.

Ces dernières années, la communauté internationale a appris à mieux comprendre les risques du nouveau système financier et leurs conséquences; elle a aussi adopté un grand nombre de mesures pour s'en prémunir.

Les principaux dangers de la nouvelle économie financière sont les suivants :

Des mouvements de capitaux déstabilisateurs. De nombreux pays émergents ont bénéficié d'apports considérables d'investissements directs et de portefeuille. Dans un nombre alarmant de cas, cependant, les investisseurs, inquiétés par des déséquilibres internes ou externes, se sont ravisés, et une hémorragie de capitaux s'est ensuivie. Depuis 1994, ces reflux de capitaux ont contribué aux graves crises financières qui ont touché une grande partie de l'Amérique latine, de nombreux pays d'Asie du Sud-Est et quelques pays en transition.

Contagion internationale des crises financières. La mondialisation des marchés financiers a incité beaucoup de gérants de portefeuilles à investir dans un grand nombre de pays dans des secteurs spécifiques ou selon des critères de risque précis. Cette stratégie a accru les risques de contagion lorsque le marché vient soudain à manquer de liquidité dans tel ou tel pays, non pas parce que sa situation économique est foncièrement mauvaise, mais parce qu'il partage certains traits avec un autre pays qui a perdu la confiance des marchés. La contagion (et le comportement moutonnier des investisseurs) sont particulièrement présents lorsque l'on dispose de peu d'information sur la santé financière du pays.

Vulnérabilité et propension aux crises du secteur financier. Les possibilités plus variées de placements profitables qu'offre un système de libre concurrence tendent à accroître les taux de rendement. Dans le même temps, elles exposent les investisseurs, particuliers ou institutionnels, à de plus grands risques, du fait notamment des bulles spéculatives. Si le surcroît de risque n'est pas convenablement maîtrisé, les institutions financières peuvent se retrouver vulnérables en cas d'événements imprévus qui provoquent une chute soudaine des prix des actifs financiers ou réels. Le jeu des forces du marché peut donc s'assortir d'un plus grand risque de crises systémiques, comme en témoignent les nombreuses crises bancaires qui ont secoué tant des pays industrialisés que des pays émergents depuis la fin des années 80. Ce problème est particulièrement aigu durant la transition à un système de marché, car les normes de contrôle et les capacités de gestion des risques mettent du temps à se mettre en place.

Délinquance financière. Il risque de devenir plus facile, avec des marchés financiers mondialisés, de blanchir des capitaux mal acquis, provenant par exemple du trafic de drogue ou de la corruption. Il risque en outre de devenir plus aisé d'échapper à l'impôt en investissant dans un paradis fiscal. Enfin, il est à craindre que la réglementation financière et les mécanismes de surveillance des places financières extra-territoriales soient insuffisants, ce qui peut menacer la stabilité du système tout entier.

La préoccupation croissante que suscitent dans l'opinion publique ces problèmes et le souci d'équité qui en découle sont des éléments cruciaux du mouvement de protestation contre la mondialisation qui s'est développé depuis quelques années. Et ces manifestations ont convaincu les décideurs qu'il est urgent de remédier aux problèmes.

Améliorer le jeu des forces du marché et la solidité des systèmes financiers

Deux conclusions ressortent particulièrement des récentes crises financières. Premièrement, pour que les forces du marché jouent correctement, il faut que les opérateurs comprennent beaucoup mieux les risques que cela ne semble avoir été le cas sur les marchés émergents dans les années 90. Deuxièmement, il est absolument indispensable d'avoir une infrastructure financière robuste pour limiter le risque qu'un changement d'appréciation des marchés ne provoque des attentes auto-réalisatrices de catastrophe financière et une contagion injustifiée de la crise au-delà des frontières.

Devant ces constats, la communauté financière a mis au point un ensemble de normes internationales de bonnes pratiques pour la conduite de la politique économique et les infrastructures financières (voir encadré), que chaque pays est encouragé à faire siennes. Le respect de ces normes devrait atténuer la nervosité des marchés en cas d'imprévus et rendre les systèmes financiers plus résistants aux crises.

Domaine Normes principales Organisme normalisateur
Transparence de la politique macroéconomique et des statistiques
Transparence de la politique monétaire et financière Code de bonnes pratiques pour la transparence de la politique monétaire et financière FMI
Transparence de la politique budgétaire Code de bonnes pratiques pour la transparence des finances publiques FMI
Diffusion des données Norme spéciale de diffusion des données (NSDD)/Système général de diffusion des données (SGDD) FMI
Infrastructure institutionnelle et discipline de marché
Insolvabilité Principes et directives pour des systèmes efficaces d'insolvabilité et de droits des créanciers Banque mondiale
Gouvernement d'entreprise Principes de gouvernement d'entreprise OCDE
Comptabilité Normes comptables internationales (International Accounting Standards - IAS) Comité international des normes comptables (CINC)
Audit Normes internationales d'audit (International Standards on Auditing - ISA) International Federation of Accountants (IFAC)
Paiements et règlements Principes fondamentaux pour les systèmes de paiement d'importance systémique Comité sur les systèmes de paiement et de règlement (CSPR)
Intégrité du marché Les quarante recommandations Groupe d'action financière sur le blanchiment d'argent Groupe d'action financière (GAFI)
Réglementation et contrôle financier
Contrôle bancaire Principes fondamentaux pour un contrôle bancaire efficace Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB)
Réglementation des valeurs Objectifs et principes de réglementation des valeurs mobilières Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV)
Contrôle des assurances Principes fondamentaux pour les assurances Association internationale des contrôleurs d'assurance (International Association of Insurance Supervisors - IAIS)

Le FMI et la Banque mondiale, qui ont l'avantage de regrouper presque tous les pays du monde (183 pays membres), sont particulièrement bien placés pour aider les pays à évaluer et à appliquer ces normes. C'est dans ce but que les deux institutions préparent actuellement des rapports sur l'observation des normes et des codes (RONC), en collaboration avec les autorités nationales et les organismes normalisateurs. Ces RONC permettent une évaluation modulaire des progrès du pays dans l'observation des normes. Le FMI établit les modules traitant de la diffusion des statistiques et de la transparence des finances publiques. La Banque mondiale se charge de la comptabilité et de l'audit, du gouvernement d'entreprise, de l'insolvabilité et des droits des créanciers. Nos deux institutions se livrent à une évaluation conjointe des normes financières dans le cadre de leur programme d'évaluation du secteur financier (PESF), qui vise à cerner les forces et les faiblesses du secteur financier d'un pays et constitue notre principal instrument dans les efforts que nous déployons pour améliorer la stabilité du secteur financier. Un module couvrant les normes destinées à combattre la délinquance financière est à l'étude.

Certains craignent que ces normes ne soient trop contraignantes pour beaucoup de pays en développement. Mais il faut rappeler que ces normes ne sont censées être appliquées que graduellement, en fonction de la situation propre à chaque pays et de sa capacité à s'y conformer, et ce à titre volontaire. Pour inciter les pays à adopter cette démarche, ils sont encouragés à définir eux-mêmes leur programme d'action et leurs objectifs.

Le but n'est pas de noter (ou de sanctionner) les pays, mais de fournir aux autorités un retour d'information constructif qui puisse les aider à définir et à appliquer les réformes opérationnelles requises pour développer peu à peu leurs systèmes financiers et s'intégrer aux marchés mondiaux. Le processus permet aussi de définir l'ordre de priorité de l'assistance technique des institutions multilatérales, des autres organismes normalisateurs et des bailleurs de fonds bilatéraux. Enfin, les RONC fournissent aux participants au marché des informations à jour sur les progrès dans l'application des normes, ce qui peut leur permettre d'affiner leur évaluation des risques.

Actuellement, 164 modules RONC se rapportant à un total de 56 pays industrialisés, émergents ou en développement ont été achevés et plus de 100 d'entre eux ont été publiés (voir www.imf.org/external/np/rosc/rosc.asp).

Des efforts redoublés de prévention et de résolution des crises

Le FMI s'emploie de bien d'autres façons à renforcer ses instruments de détection, de prévention et de résolution des crises. Par exemple, pour affiner notre compréhension des forces qui meuvent en permanence les marchés de capitaux, nous avons rassemblé l'ensemble de nos travaux d'analyse au sein d'un nouveau Département des marchés de capitaux internationaux qui est opérationnel depuis le 1er août 2001. Par ailleurs, un Groupe consultatif sur les marchés de capitaux fournit désormais une enceinte pour un dialogue suivi avec les acteurs du marché.

    Déceler les points faibles

Le FMI suit et analyse en permanence l'évolution de ses pays membres et de l'économie mondiale en s'attachant à déceler les facteurs de vulnérabilité. Nous nous équipons par exemple d'outils d'analyse permettant de détecter l'imminence d'une crise. Ces outils sont bien sûr hautement imprécis et demandent à être affinés. Certains ont suggéré que le FMI devrait rendre publics régulièrement ces indicateurs d'alerte avancée. Mais on risquerait alors d'obtenir l'inverse du résultat recherché et de déclencher une crise. Nous allons probablement plutôt utiliser ces indicateurs en interne pour attirer notre attention sur les risques à un stade précoce. Ils doivent nous servir principalement à donner aux autorités des conseils pertinents suffisamment à l'avance pour qu'elles puissent prendre à temps des mesures correctrices. Il peut par exemple être recommandé de modifier le régime de change afin de réduire les risques d'attaque spéculative, ou d'ajuster la politique budgétaire, monétaire ou structurelle afin de corriger les déséquilibres qui apparaissent dans l'économie.

Beaucoup de banques internationales se sont aussi dotées d'indicateurs d'alerte avancée pour améliorer leurs systèmes de gestion des risques et répondre aux besoins de leurs clients. Cette information permet de mieux différencier les pays. Cela contribue à réduire le risque de contagion, qui a d'ailleurs posé moins de problèmes à la suite des récentes crises en Turquie et en Argentine que lors des crises asiatiques.

Le FMI a par ailleurs revu ses mécanismes de prêt de manière à jouer un rôle plus efficace dans la prévention et la résolution des crises. Il s'est dotés de nouvelles facilités, dont la Ligne de crédit préventive (LCP) qui est à la disposition des pays membres ayant de solides antécédents économiques. L'idée de base est simple : le FMI offre une ligne de crédit de précaution à des pays qui ont rempli certaines conditions. Cela accroît en fait le fonds de ressources de change où ils peuvent puiser en cas de crise. Le fait que la disponibilité de ces ressources soit connue peut décourager une attaque spéculative. En décernant aux pays admissibles à un label de qualité pour leur politique économique, on réduit aussi le risque que les investisseurs retirent leurs fonds de manière indiscriminée parce qu'une crise a éclaté ailleurs. Nos pays membres ont montré quelque réticence à l'égard de la LCP—craignant sans doute qu'en y faisant appel, ils donnent l'impression de redouter une crise—, mais plusieurs pays ont marqué leur intérêt. Cette facilité pourrait devenir un pilier important de l'architecture financière.

Bien d'autres réformes sont en cours au FMI pour donner à notre institution plus de transparence et tirer les leçons de notre expérience. Ainsi, nous avons créé récemment un Bureau d'évaluation interne dont le directeur jouit d'une grande indépendance.

    Participation du secteur privé à la résolution des crises

On a beau s'évertuer à réduire le risque de crise financière, des crises éclatent quand même. Cela dit, il y a moyen d'en limiter le coût tant pour le pays directement touché que pour le reste du monde. Il doit être entendu d'emblée que c'est le pays lui-même qui prend les mesures jugées nécessaires pour remédier aux causes de la crise. À l'appui de ces mesures, destinées à rétablir la capacité de paiements extérieurs du pays, le FMI et éventuellement d'autres créanciers officiels apportent leur concours financier. Les créanciers privés peuvent dès lors accepter de renouveler les lignes de crédit et obligations existantes et même d'accorder au pays de nouveaux prêts. On parvient ainsi à éviter qu'une crise de liquidité ne se transforme en une coûteuse crise de solvabilité, pour le plus grand bien des uns et des autres.

Ce scénario illustre la démarche catalytique que le FMI s'efforce toujours de suivre (sauf dans les rares circonstances où l'on estime que le pays ne pourra pas à brève échéance faire de nouveau appel aux marchés et qu'il faut réduire sa dette extérieure). Malheureusement, en pratique, les choses ne se passent pas toujours aussi aisément, et le FMI recherche en permanence la collaboration de tous pour associer le secteur privé à la résolution des crises. Des exemples récents ont montré que cette démarche peut être payante, mais il est clair que les accords ainsi trouvés ne peuvent donner de résultats que si les autorités sont déterminées à mettre en _uvre les réformes qui s'imposent.

Si les créanciers privés ont lieu de croire que ce genre d'accords fera partie du processus de résolution des crises, cela devrait réduire le risque d'effet pervers, en évitant de donner l'impression que le FMI sera toujours prêt à débourser des fonds suffisants pour permettre aux créanciers privés de retirer leur épingle du jeu. Certes, on exagère sans doute la gravité de ce risque d'effet pervers, comme en témoignent les lourdes pertes subies par les créanciers privées lors des récentes crises et les marges élevées dont sont assortis les emprunts des pays émergents. Cependant, il n'est pas concevable que l'assistance financière de la communauté internationale puisse continuer de croître au même rythme que les transactions financières transfrontalières. Il est donc prioritaire pour le FMI de trouver les moyens de faire jouer au secteur privé un rôle constructif dans le processus de résolution des crises.

    Une taxe Tobin?

Pour réduire la volatilité des marchés de capitaux internationaux, certains préconisent l'institution d'une taxation légère des transactions de change, sorte de «grain de sable pour gripper l'engrenage» et décourager la spéculation (c'est la taxe Tobin, du nom de l'économiste qui a été le premier à la proposer). Le FMI doute qu'il soit faisable d'imposer cette taxe universellement (ce qui serait nécessaire pour éviter les détournements de flux financiers) et qu'elle soit efficace. En fait, pour décourager la spéculation—qui peut rapporter gros—, il faudrait une taxe Tobin relativement élevée, qui frapperait aussi les transactions non spéculatives liées aux échanges commerciaux. En outre, la taxe Tobin tendrait à dissuader les investisseurs « à contre-courant » de s'opposer aux tendances du marché qui ne cadrent pas avec les fondamentaux économiques. La taxe Tobin risque donc de réduire la liquidité des marchés et d'en accroître en réalité la volatilité—ce qui est manifestement à l'opposé du but recherché. (Ceux qui la préconisent cherchent parfois à en rehausser l'attrait en proposant que le produit de cette taxe soit réservé aux pays les plus pauvres. Le FMI est on ne peut plus favorable à l'idée d'accroître l'aide au développement, mais il n'y a pas besoin pour cela d'une taxe Tobin.)

* * *

En conclusion, même si une architecture financière internationale plus solide est en train d'émerger, il est crucial pour réduire la fréquence et la gravité des crises que les pays remédient à leurs faiblesses avant d'y être contraint par une crise. C'est ce qu'ont manqué de faire quasiment tous les pays émergents qui ont essuyé des crises financières au cours des dix dernières années. Une des vérités de la nouvelle économie financière est que pour jouir des bienfaits de la mondialisation et réduire le risque de fluctuations déstabilisatrices de la confiance des investisseurs, un pays doit obligatoirement avoir une politique économique et des institutions de la plus haute qualité. Le FMI a pour tâche d'y aider ses pays membres.



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