Typical street scene in Santa Ana, El Salvador. (Photo: iStock)

(photo : Sultan Mahmud Mukut/SOPA Image/Newscom)

Bulletin du FMI : Les crises financières synchronisent la production économique

le 30 septembre 2013

  • La production régionale et mondiale présentent des corrélations accrues durant les crises financières
  • L’ampleur des retombées de la production dépend du type de choc et de la force des liens avec l’économie d’origine
  • La mondialisation financière n’induit pas forcément une synchronisation accrue de la production entre les pays — jusqu’à l’avènement d’une crise

La panique déclenchée par la crise financière mondiale de 2008–09 a entraîné une chute sans précédent de la production qui a amené temporairement les pays à évoluer en étroite harmonie, selon une nouvelle étude du FMI.

Durant la crise, on a constaté une plus forte corrélation que d'habitude entre les résultats économiques de divers pays.  (Photo : iStock)

Durant la crise, on a constaté une plus forte corrélation que d'habitude entre les résultats économiques de divers pays. (Photo : iStock)

PERSPECTIVES DE L’ÉCONOMIE MONDIALE

Au plus fort de la crise, la production à l’échelle mondiale a connu une évolution synchronique à nulle autre pareille dans l’histoire récente, selon une étude du FMI publiée dans l’édition d’octobre 2013 des Perspectives de l’économie mondiale. Auparavant, les corrélations entre les taux de croissance du PIB de divers pays avaient été modestes, mais se sont accrues de façon spectaculaire sur la période 2007–09 (graphique 1).

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Le surcroît de corrélation ou de «covariation» ne s’est pas limité aux économies avancées, principales victimes de la crise, mais a été observé dans toutes les régions géographiques. À l’instar des épisodes antérieurs, où la synchronie de la production a culminé, la hausse a été temporaire. Depuis 2010 en effet, ces covariations de la production ont pratiquement retrouvé leurs niveaux d’avant la crise malgré la persistance des difficultés économiques en Europe.

Un vif débat persiste sur les causes de l’effondrement et de la reprise synchronisés à l’échelle mondiale et, de façon plus générale, sur les ressorts de cette synchronie.

Les liens commerciaux et financiers constituent l’explication la plus probable, car ils peuvent transmettre à d’autres pays des chocs spécifiques à un pays.

Deuxième explication possible : la covariation accrue de la production a été engendrée par de vastes chocs communs touchant quasi simultanément de nombreux pays — par exemple, un brusque regain d’incertitude financière ou un «coup de semonce» ayant suscité chez les investisseurs un changement d’opinion à l’égard du monde.

Enfin, il se peut que la nature des chocs ait évolué. Les chocs touchant les secteurs financiers nationaux — crises bancaires et gels de liquidités par exemple — ont été plus courants durant la crise financière mondiale. En période de crise, Ces chocs financiers peuvent se transmettre à d’autres pays de façon plus virulente que les chocs de l’offre et de la demande, plus fréquents en temps normal.

Essor mondial

Même si les liens financiers ont probablement contribué à accentuer les covariations, l’étude constate qu’un vif essor des corrélations régionales et mondiales de la production survient généralement durant des crises financières comme celles de l’Amérique latine dans les années 80 et de l’Asie dans les années 90. En outre, quand la crise frappe une économie comme celle des États-Unis — pays vaste et pôle financier mondial — les effets sur la synchronisation de la production mondiale sont disproportionnellement importants. Durant la crise de 2007–09, les chocs financiers américains ont eu quatre fois plus de répercussions qu’en d’autres périodes. Autrement dit, la crise financière mondiale a eu une plus forte incidence sur la production qu’on ne l’aurait prédit par l’ampleur du choc financier sous-jacent aux États-Unis.

Contre toute attente, les liens commerciaux n’ont guère contribué à propager la crise entre les pays. Les liens financiers ont eu cet effet, mais d’autres facteurs — tels que la panique mondiale, le regain d’incertitude et les «coups de semonce» qui ont amené les investisseurs à changer d’avis en matière de risques et de rendement — ont agi comme un choc commun et ont contribué beaucoup plus largement à accroître la synchronisation de la production.

Corrélations internationales

Le fait que les covariations soient de moindre ampleur aujourd’hui ne signifie pas que les décideurs puissent ignorer les effets de chocs exogènes tels que le ralentissement de la croissance ou le resserrement des politiques monétaire et budgétaire dans les principales économies. Mais ils ne devraient pas non plus se soucier de la même manière de tous les chocs potentiels.

D’abord, la taille compte. Les États-Unis sont encore la plus grande puissance mondiale, même si la zone euro, la Chine et le Japon sont les principales sources de répercussions dans leurs régions respectives.

Ensuite, l’ampleur des répercussions dépend de la nature du choc et de la force des liens avec l’économie d’où provient ce choc. Ainsi, bien que l’austérité budgétaire aux États-Unis ou dans la zone euro affecte surtout leurs principaux partenaires commerciaux, l’effet de la normalisation des taux d’intérêt aux États-Unis se ressent d’abord dans les pays dont la monnaie est arrimée au dollar EU par le canal des taux d’intérêt (graphique 2). En revanche, les pays à régime flexible peuvent se servir de leur taux de change comme d’un amortisseur.

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Coûts et avantages de l’intégration financière

L’idée reçue selon laquelle la mondialisation financière mène nécessairement à une plus forte covariation de la production entre les pays ne se vérifie pas tant qu’une crise n’a pas frappé. En effet, les liens financiers transmettent les tensions par-delà les frontières; mais, en temps normal, quand prédominent les chocs réels de l’offre et de la demande, ces liens facilitent une allocation efficace des capitaux à l’échelle internationale. Ils acheminent les capitaux vers les endroits où ils sont le plus productifs. L’essentiel est de préserver les avantages d’une intégration financière accrue tout en minimisant les risques connexes par une meilleure supervision, et notamment par le renforcement de la coordination et de la collaboration en matière de politique économique.