Typical street scene in Santa Ana, El Salvador. (Photo: iStock)

(photo : Sultan Mahmud Mukut/SOPA Image/Newscom)

Bulletin du FMI : Le ralentissement de la croissance mondiale a des effets différenciés sur les pays à faible revenu

le 17 décembre 2015

  • La chute des cours des matières premières a ses gagnants et ses perdants
  • Les pays dont l’économie est diversifiée s’en sortent mieux que les exportateurs de matières premières
  • Beaucoup de pays sont plus vulnérables, notamment face au changement climatique

La situation extérieure des pays en développement à faible revenu s’est dégradée au cours des dix-huit derniers mois, mais avec au total des effets très différenciés selon les pays, d’après une récente étude du FMI.

Oléoducs près de Port Harcourt (Nigéria), d’où le pétrole est exporté. La chute des cours se ressent particulièrement dans les pays tributaires des exportations de produits de base (photo : George Steinmetz/Corbis)

Oléoducs près de Port Harcourt (Nigéria), d’où le pétrole est exporté. La chute des cours se ressent particulièrement dans les pays tributaires des exportations de produits de base (photo : George Steinmetz/Corbis)

PAYS À FAIBLE REVENU

Si l’ensemble des 60 pays membres du FMI classés comme pays à faible revenu ont été éprouvés par le ralentissement de la croissance mondiale, c’est la chute spectaculaire des cours des matières premières au cours des dix-huit derniers mois qui a été le choc le plus marquant. D’après l’étude, les pays qui dépendent de leurs exportations de matières premières (notamment les exportateurs de pétrole) ont été durement touchés, tandis que ceux dont les exportations sont plus diversifiées ont bénéficié de la baisse des prix et continuent à afficher un bon rythme de croissance.

L’étude intitulée Macroeconomic Developments and Prospects in Low-Income Developing Countries: 2015 passe en revue les événements récents et présente les perspectives à court terme de ce groupe de pays, qui sont presque tous admissibles aux financements concessionnels du FMI.

«S’il est vrai que la conjoncture économique globale s’est affaiblie, surtout en ce qui concerne les cours des matières premières, ses retombées sur les pays à faible revenu sont très variables, selon leur exposition aux risques externes et leur situation interne», a déclaré Seán Nolan, Directeur adjoint du Département de la stratégie, des politiques et de l’évaluation du FMI, qui a supervisé la production du rapport. «La riposte doit être adaptée aux particularités de chaque pays», a souligné M. Nolan.


Les effets contrastés de la chute des matières premières

La dégringolade des cours a particulièrement touché les pays exportateurs de matières premières, notamment les producteurs de pétrole, dont le taux de croissance tombera de 5,7 % en 2014 à 3,0 % en 2015. Par contre, les pays dont les recettes d’exportation dépendent moins des produits de base et dont la facture énergétique a diminué, par exemple, vont afficher une croissance qui pourrait aller jusqu’à 6 % en 2014-15.

L’étude présente un tableau contrasté de l’impact net de l’évolution des cours des matières premières, même au sein d’un même sous-groupe de pays. Alors que certains — Cambodge, Nicaragua et Sénégal — en ont tiré avantage, la détérioration des termes de l’échange a été disproportionnée pour quelques gros exportateurs de pétrole comme le Nigéria, par exemple (graphique 1).

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Vulnérabilité grandissantes

Le rapport indique que les vulnérabilités économiques des pays à faible revenu n’ont cessé de s’aggraver au cours des deux dernières années, et que près de 40 % d’entre eux, contre 25-30 % ces dernières années, sont désormais jugés très vulnérables à des chocs liés à la croissance, ce qui représente un sommet depuis la crise financière mondiale (graphique 2).

Les facteurs dominants sont la chute des cours des matières premières, qui a affaibli les soldes budgétaires et extérieurs, ainsi que l’érosion graduelle des marges de manœuvre au fil des ans. Les pays dont les exportations sont diversifiées s’en sont mieux tirés que ceux qui n’exportent que des matières premières, mais les vulnérabilités s’accentuent dans certains cas.

Le rapport souligne que les pays exportateurs de matières premières vont devoir s’adapter à ce qui s’annonce comme une longue période de cours relativement bas, et consolider sur la durée leur situation budgétaire et extérieure. Ceux qui ont connu une croissance robuste mais voient croître leurs vulnérabilités doivent agir rapidement pour reconstituer leurs marges de manœuvre.

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Le rapport note que sur le long terme le changement climatique constitue un risque supplémentaire pour les pays en développement à faible revenu. Ils sont déjà plus vulnérables aux catastrophes naturelles que les pays à revenu plus élevé. De par leur situation géographique (généralement dans des zones à climats chauds), et du fait que le secteur agricole — tributaire des conditions météorologiques — y représente une grosse partie du PIB, ils risquent de souffrir davantage du réchauffement climatique.

«Les pays en développement à faible revenu vont avoir besoin d’une assistance financière extérieure considérable à l’appui de leurs plans nationaux d’adaptation climatique, faute de quoi il sera très difficile à plus longue échéance d’atteindre les objectifs de développement ambitieux», a déclaré Seán Nolan.

Les capitaux continuent à affluer

Le rapport signale que les flux de capitaux à destination des pays en développement à faible revenu ont sensiblement augmenté ces dernières années, en particulier les investissements de portefeuille dans les pays préémergents (graphique 3). Ces pays ont en général libéralisé les mouvements de capitaux plus rapidement que les autres pays à faible revenu, et certains ont aujourd’hui un régime aussi ouvert que celui des pays émergents.

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Les entrées de capitaux ont dopé la demande intérieure, le financement extérieur servant à stimuler tantôt la consommation et tantôt les investissements, en fonction des choix de chaque pays. Dans quelques cas, l’augmentation du financement extérieur des dépenses internes a coïncidé avec une baisse de l’épargne publique et une hausse de la consommation publique.

Soulignant le durcissement des conditions de financement, le rapport appelle à la prudence au sujet des investissements de portefeuille : «les pays qui misent davantage sur la disponibilité des financements extérieurs s’exposent par là même à un nouveau risque — d’inflexions de la conjoncture extérieure — et doivent s’attacher en priorité à préserver la solidité de leurs fondamentaux économiques, y compris une robuste capacité de gestion de la dette publique».