Bulletin du FMI : Malawi : la croissance durable passe par la maîtrise de l’inflation
le 6 janvier 2016
- Une forte inflation asphyxie l’économie
- La confiance des donateurs compromise par des détournements de fonds publics
- Des réformes économiques audacieuses contribuent à relever le niveau des réserves
Réduire l’inflation est la priorité absolue pour la politique économique du Malawi à court terme, comme l’explique le FMI dans son récent bilan de l’économie du pays.
BILAN DE SANTÉ ÉCONOMIQUE
Le rapport montre que la dépréciation de la monnaie et les incertitudes liées aux orientations futures de l’action des pouvoirs publics ont maintenu l’inflation au dessus de la barre des 20 % en moyenne. L’économie, très dépendante de l’aide, reste pénalisée par l’impact du vaste détournement de fonds publics mis au jour en 2013.
Ce scandale, surnommé cashgate, a poussé les donateurs à suspendre tout appui budgétaire, contraignant l’État à actionner la planche à billets pour couvrir le déficit. Une récolte de maïs médiocre, due à de fortes inondations et à une sécheresse au début 2015, a exacerbé le problème en renchérissant les produits alimentaires et en attisant davantage l’inflation.
«Si rien n’est fait pour juguler l’inflation, elle risque de se perpétuer, de continuer à pénaliser l’investissement et la croissance et de détériorer les conditions de vie, en particulier pour les pauvres », précise l’étude.
Les réformes économiques portent leurs fruits
Tout en constatant les difficultés auxquelles est confronté le Malawi, le rapport salue les réformes économiques audacieuses entreprises au milieu de 2012, qui ont fait beaucoup pour la résilience de l’économie. La dévaluation du kwacha, l’adoption d’un régime de change flottant, la libéralisation du marché des devises et l’adoption d’un mécanisme d’ajustement automatique du prix des carburants ont permis d’augmenter les réserves de change du pays, dont la couverture est passée d’un mois à plus de trois mois d’importations.
Le rapport salue également les progrès notables réalisés dans le domaine social : il y a maintenant autant de filles que de garçons inscrits à l’école primaire, l’accès à l’eau a été amélioré et la mortalité infantile a été encore réduite — elle est inférieure à la moyenne de l’Afrique subsaharienne depuis 2004.
Le rapport rappelle toutefois que le niveau élevé de l’inflation entrave la croissance du PIB réel, qui n’a été en moyenne que de 4 % pendant la période 2012-15, soit très au-dessous de l’objectif de 7 % fixé dans la stratégie de croissance et de développement du Malawi.
Interdépendance entre les sphères budgétaire et financière
L’ajustement budgétaire insuffisant qui a suivi le cashgate a atteint la sphère financière par plusieurs canaux de transmission, précise le rapport. Les créances improductives ont augmenté suite à l’accumulation d’arriérés de paiements intérieurs aux fournisseurs privés, lesquels ont eu des difficultés à rembourser leurs emprunts. Le risque de crédit est désormais le principal danger pour le secteur bancaire.
Le recours accru aux financements intérieurs pour combler le déficit a eu un effet d’éviction sur les prêts bancaires au secteur privé et le niveau obstinément élevé de l’inflation a fait augmenter les taux d’intérêt et accru la volatilité du taux de change. Ces facteurs, explique le rapport, ont à leur tour pénalisé le budget et augmenté le coût du service de la dette intérieure.
Le rapport constate que le secteur financier a régulièrement gagné en profondeur et en inclusion jusqu’en 2012, mais que depuis la situation stagne du fait d’une inflation toujours élevée et d’une multiplicité d’obstacles structurels, comme le manque d’accès au crédit, la sporadicité de la fourniture d’électricité et la cherté des transports. De plus, la moitié de la population des zones rurales n’a pas d’accès aux services financiers, surtout cantonnés aux zones urbaines. D’après le rapport, lutter contre ces obstacles structurels serait très bénéfique à l’économie, en réduisant la pauvreté et en permettant une croissance durable et inclusive.
Comme le Malawi dépend des exportations d’un petit nombre de produits de base, essentiellement le tabac, et que son économie est exposée à des chocs exogènes de grande ampleur, il importe, comme le souligne le rapport, de rétablir la stabilité macroéconomique à brève échéance par des politiques budgétaire et monétaire plus rigoureuses visant à placer l’inflation sur une trajectoire de baisse.
Le rapport encourage également les autorités à mener des réformes structurelles pour supprimer les goulets d’étranglement au niveau de l’offre, accroître la productivité de l’agriculture et améliorer le climat des affaires.